Il détruit tout ou presque sur son passage. Le feu remet les écosystèmes à zéro. Un spectacle aussi fascinant qu'inquiétant. - Les efforts pour contenir la progression des incendies se poursuivent - 72 000 ha de végétation ont brûlé. - La saison des mégafeux a commencé très tôt et fait des ravages. Et si les humains combattent ces incendies, les plantes y sont adaptées. Mais pour combien de temps ? Les feux existent depuis toujours. Depuis qu'il y a de la végétation sur Terre. Mais avec le changement climatique, ça va donner quoi ? Montaud, sud de la France. Une garrigue régulièrement balayée par des incendies. Des milliers d'hectares partent en fumée sur ce site. En 1989, puis en 2010 et en décembre 2023, les autorités organisent un brûlage dirigé. Un incendie volontaire pour rouvrir le milieu afin que des animaux de pâturage puissent y circuler à nouveau. Après chaque incendie, les plantes renaissent de leurs cendres. - Le chêne vert a une écorce assez épaisse. Il est possiblement capable de résister et si l'individu résiste, il refera de nouveaux rameaux. A quelques mètres de là, une autre stratégie adoptée pour survivre au feu. - Sur ce chêne kermès, vous voyez la repousse, sa régénération à partir de la base, le système racinaire. La partie aérienne est morte. Mais au sol, les racines ont été préservées. La même espèce, le même individu, repousse à partir de ses racines. Toutes les espèces ne survivent pas aux flammes, mais elles ne disparaissent pas pour autant de l'écosystème. - Pour se régénérer, le pin d'Alep ne va pas permettre à un individu mort de ressusciter, impossible, mais ses graines généreront de nouveaux arbres. Le feu fait partie du cycle de reproduction du pin d'Alep. Ces cônes, en temps normal, sont fermés par la sérotine. Cette résine fond en présence du feu, les cônes s'ouvrent alors, libérant leurs graines. - Ce qui est important pour caractériser un écosystème, c'est son régime d'incendies. En Méditerranée, les feux sont relativement fréquents. On a des feux tous les 15, 20, 30 ans et les espèces ont dû s'adapter. Mais lorsque les incendies changent de fréquence, d'intensité, de saison, les écosystèmes changent aussi. Cette forêt a brûlé en 2009. Puis en 2016, seulement 7 ans plus tard. Résultat : le chêne kermès a tout colonisé et le pin d'Alep a disparu. - Ceux qui étaient là ont brûlé sans pouvoir produire de cônes. Aucun pin ne peut pousser là, car les individus étaient trop jeunes lors du deuxième feu. C'est une sorte de blocage pendant un certain temps. Pas jusqu'au prochain feu, mais presque, malheureusement. Selon les modèles actuels, le changement climatique va augmenter l'intensité et la fréquence des sécheresses dans certaines régions françaises, entraînant une augmentation des risques d'incendies. Pour prévoir l'impact d'un changement de régime d'incendies sur un écosystème dans le futur, il est souvent utile de regarder dans le passé. A l'Institut des Sciences de l'Evolution de Montpellier, Christelle Hély et son équipe retracent l'histoire des feux anciens en étudiant la vase déposée au fil des années dans le fond des lacs. - Imaginons un feu autour d'un lac qui produira beaucoup de charbon avec de la fumée et des particules qui vont s'envoler. Certaines traversent au-dessus du lac et vont tomber pour sédimenter au fond du lac. La vie du lac continue donc ça s'accumule. Quand on marche dans la vase, on marche dans le passé. L'étude des charbons et des pollens enregistrés dans les sédiments raconte l'histoire des écosystèmes anciens. Il y a eu un pic d'incendies à une époque bien précise : entre 6 000 et 8 000 ans, une époque dite de maximum d'insolation, lorsque la Terre recevait plus d'énergie du Soleil qu'aujourd'hui. - Ça brûlait plus que maintenant. Mais l'impact humain était bien moindre que maintenant. En terme de végétation, on a les mêmes espèces maintenant par rapport à avant. Mais pas forcément dans les mêmes proportions. Les feux ne créent pas d'extinctions d'espèces en tant que telles, mais vont faire que les espèces seront plus ou moins abondantes à certains moments et endroits. Pas de bouleversements à long terme pour les écosystèmes en cas de forte augmentation du nombre d'incendies, mais cela reste dans notre intérêt de limiter les feux qui déferlent hors de notre contrôle. En dépit de la hausse prévue par les modèles climatiques, nous sommes capables malgré tout de faire baisser le nombre de feux. L'écrasante majorité des départs de feux dans le monde est l'oeuvre des humains.