À Rennes, à deux pas de la place Sainte-Anne, c'est un bâtiment qui passe inaperçu. Et pourtant, c'est un lieu chargé d'histoire, aux multiples vies. Aujourd'hui salle de quartier, c'était au 17ème siècle, un jeu de paume. Il faut s'imaginer qu'on jouait à un jeu de raquette, l'ancêtre du tennis. Le joueur pouvait lancer sa balle contre ce mur, ou bien sur les galeries de côté où on trouvait également les spectateurs. Le jeu de paume devient une chapelle, puis un hôpital militaire. Racheté par la ville de Rennes, des fouilles y débutent en 2012, avant réhabilitation. C'est un bâtiment unique puisque des quatre salles de jeu de paume de Rennes, c'est la seule qui reste en élévation. Mais avant transformation, les archéologues ont voulu en garder une trace. Dans cette salle de réalité virtuelle unique en son genre, vous êtes plongés en 2012. On retrouve le site tel qu'il a été fouillé par les archéologues, avant de lancer les travaux. On ne retrouve plus la grande salle du jeu de paume, ni les volumes de la chapelle. Mais on a plein de petites pièces, deux niveaux au-dessus du rez-de-chaussée. Pour obtenir autant de détails, le bâtiment a été scruté au peigne fin par un scanner laser. Le laser envoie un signal et récupère à chaque fois un point. Et on obtient un nuage de points de centaines de millions de points, qui sont affichés dans cette restitution en 3D. Pour déambuler virtuellement dans les moindres recoins du bâtiment, le chercheur est équipé de lunettes et d'une manette. La différence avec le cinéma 3D, sur les lunettes au cinéma, ce sont ces marqueurs réfléchissants. Ils sont suivis et captés par ces caméras infrarouges positionnées autour de l'écran, qui vont suivre les positions de votre tête, l'orientation de votre regard, pour recalculer les images en temps réel, et s'adapter à votre point vue. Sur d'autres projets, les chercheurs peuvent même faire un bond de plusieurs siècles en arrière. Cette historienne travaille depuis dix ans sur un navire de la Compagnie des Indes, échoué au 18ème siècle. La voilà sur le bateau. En déambulant aux côtés de l'équipage, elle a une vision plus concrète de la vie à bord. Je me suis rendue compte que sur les passavant, de chaque côté du navire, qui permettent d'aller de l'avant à l'arrière, l'espace n'est pas large. Il est très étroit. On se rend mieux compte de ce qu'étaient ces traversées. Pour reconstituer virtuellement ce bateau, les chercheurs de plusieurs laboratoires ont mis deux ans et demi, car ils sont partis de loin. Au début du projet, ils disposaient seulement du plan et de la maquette du bateau. On récupère une modélisation 3D qui vient des infographistes, et on sépare les différents objets pour les faire bouger indépendamment des autres. Par exemple, on va vouloir faire bouger la barre. On peut également faire des tirs de canon, ou ajouter des interactions avec les humains virtuels. Des personnages virtuels conçus grâce à la capture de mouvement. Dans ce gymnase, des humains ont reproduit des gestes typiques de l'époque. On va recouvrir cette personne de marqueurs réfléchissants et on va suivre les mouvements de l'utilisateur. En résultat, on va obtenir le remplissage du journal de bord, le briquage de pont, monter dans les haubans. Mais ne vous y trompez pas, ce n'est pas un jeu vidéo. Les scientifiques tiennent à reconstituer uniquement la réalité. La partie difficile, c'est de rester sur la partie réelle des éléments, coller à ce que les historiens ou les archéologues nous disent et ne pas discourir, faire des hypothèses non fondées qui n'auraient aucun sens au niveau historique. Gadget pour certains, nécessaire pour d'autres, la réalité virtuelle semble devenir incontournable pour les archéologues et historiens.