- Bonjour, Bruno.
- Ça va ?
- Ça va, bien dormi ?
- Très bien, oui.
Une nouvelle journée de travail commence pour Bruno et Philippe dans un décor plutôt inhabituel et sympathique : l'Observatoire pyrénéen du Pic du Midi qui culmine à près de 3000 mètres. Pendant toute la journée,
ils surveillent l'activité du Soleil à l'aide d'un instrument appelé coronographe.
- On prend quatre images simultanées. On prend deux images
de l'extérieur du Soleil, en réalisant une éclipse artificielle qui permet de ne voir que la périphérie, que la couronne du Soleil. Et deux images du Soleil lui-même dans des fréquences différentes. La périphérie permet de voir les éruptions et les mouvements de matière qu'il y a autour du Soleil.
Si on ne fait pas ça, le Soleil est tellement lumineux qu'on ne peut pas voir ce qui est à l'extérieur.
Pourtant, ni l'un ni l'autre ne sont scientifiques. Bruno est ingénieur en retraite, Philippe, juriste.
Ce sont des observateurs amateurs bénévoles.
Nous fonctionnons en autonomie,
nous avons une cuisine
avec une réserve
et nous sommes logés sur place.
On a vraiment le sentiment
de pouvoir travailler
et vivre de façon conviviale.
Quand le Soleil
se cache un peu trop souvent,
on se réfugie ici
et on peut lire,
regarder la télévision,
ou discuter avec les techniciens.
C'est un don aussi pour la science,
mais dans un endroit particulier.
C'est aussi pour nous
une façon de prendre du recul
en même temps.
Ça a beaucoup de sens pour moi
et pour tous ceux
qui participent à cette mission.
On a le sentiment de faire
quelque chose d'intéressant et d'utile.
Ils sont ainsi
une soixantaine d'amateurs à se relayer
toute l'année, tous les jours,
pour offrir aux scientifiques
des données continues sur le Soleil.
Ils côtoient d'autres amateurs,
mais aussi des professionnels
spécialisés
dans la météorologie et l'astronomie.
Cette complémentarité entre amateurs
et professionnels est très importante.
Par exemple, au Pic du Midi,
le service de la couronne solaire
ne pourrait pas fonctionner
sans une équipe de bénévoles,
de passionnés, qui vont observer
pour faire tourner
le service d'observation scientifique.
De même, au téléscope Bernard Lyot,
nous accueillons aussi des bénévoles
qui font les observations de service
pour la communauté scientifique.
Cette complémentarité,
cette aide commune,
est très importante
pour les observatoires.
Au Pic du Midi, on y vit
et on y travaille en permanence.
Jour et nuit, amateurs, scientifiques
mais aussi une vingtaine de salariés
qui assurent
la logistique, l'accueil,
la maintenance, la sécurité, l'entretien.
Tout un petit monde
qui a pourtant bien failli disparaître.
Dans les années 1990,
l'observatoire est menacé de fermeture.
Il coûte cher et subit la concurrence
des grands observatoires internationaux.
Pour sa survie, on décide donc
d'ouvrir le site aux touristes.
C'est un succès.
Ils sont, en temps normal,
près de 140 000 visiteurs chaque année.
Le site du Pic du Midi
a été un pionnier
dans le fait d'associer
le tourisme et la science.
Ce n'était pas vraiment
évident au départ.
Et c'est une alchimie
qui a fonctionné formidablement.
Le bénévolat
est la troisième pierre à l'édifice.
C'est très important pour nous
d'avoir accès au grand public
et de pouvoir
diffuser les informations.
Et on a la chance, au Pic du Midi,
de pouvoir les accueillir directement
sur le lieu de prise de données,
donc sur le lieu de fabrication
de cette connaissance.
C'est un apport
extraordinaire et assez unique
du Pic du Midi dans le monde.
On en profite beaucoup
et bien sûr, dès qu'on peut,
on sort et on va discuter
avec le grand public
pour expliquer notre travail.