Près de 50 ans après la dernière mission lunaire réussie de Moscou, la sonde Luna-25 s'est écrasée sur la Lune, rappelant les problèmes de l’industrie russe, minée par la corruption et le manque d’innovation et de partenariats, en pleine course internationale à l’espace.

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Image diffusée par l’agence spatiale russe Roscosmos, le 11 août 2023, du décollage de la fusée Soyouz 2.1b emportant la sonde lunaire Luna-25, à Vostochny © Agence spatiale russe Roscomos/AFP Handout

La sonde Luna-25, la première à être lancée par la Russie vers la Lune depuis 1976, a percuté le sol lunaire à la suite d'un incident survenu samedi lors d’une manœuvre préalable à son alunissage, a annoncé l’agence spatiale russe dimanche. Après « une impulsion donnée pour former son orbite elliptique de pré-alunissage », explique Roscosmos dans un communiqué. « Les mesures prises les 19 et 20 août pour rechercher l’appareil et entrer en contact avec lui n'ont donné aucun résultat », a regretté l’agence spatiale. Avant d’ajouter: « Selon les résultats préliminaires » de l’enquête, l’appareil « a cessé d’exister à la suite d'une collision avec la surface lunaire ». Cet échec intervient au moment même où le président russe Vladimir Poutine avait promis de poursuivre le programme spatial russe malgré les problèmes de financement, les scandales de corruption et l’isolement russe du fait du conflit en Ukraine.

« Une commission interministérielle » sera chargée de faire la lumière sur « les raisons » de l’incident qui a causé « la perte » de Luna-25, a par ailleurs annoncé Roscosmos, qui n’a pas donné de causes possibles au problème technique survenu. « Une situation d’urgence s’est produite à bord de la station (lunaire) automatique, ce qui n’a pas permis d'effectuer la manœuvre avec les paramètres spécifiés », avait indiqué l'agence spatiale russe. Roscosmos n’avait ainsi pas donné plus de détails sur les circonstances de l’incident, laissant penser que le pire était à craindre pour Luna-25, un appareil de près de 800 kilos.

Probabilité de réussite de 70%

La mission Luna-25, destinée à donner un nouvel élan au secteur spatial russe, était annoncée comme « risquée » de l’aveu même du patron de Roscosmos, Iouri Borissov. Face à Vladimir Poutine en juin dernier, il avait déclaré :  « La probabilité de réussite de telles missions est estimée à environ 70% ». Luna-25 avait été placée avec succès en orbite lunaire mercredi, après avoir décollé dans la nuit du 10 au 11 août de l'Extrême-Orient russe. Son alunissage était prévu lundi sur le pôle Sud lunaire, ce qui aurait été une première, car jusqu’ici, les engins se posaient dans la zone équatoriale. La mission Luna-25, prévue initialement pour durer un an, avait pour but de prélever et analyser des échantillons du sol lunaire.

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La sonde Luna-25 lors de ses préparatifs techniques © Russian Space Agency Roscosmos/AFP/Archives Handout

Son échec rappelle que les difficultés du secteur spatiale russe se sont accumulées ces dernières années, entre corruption endémique, problèmes chroniques de financement, manque d’innovation et utilisation de technologies de conception soviétique. Les conséquences de l’offensive militaire en Ukraine n’ont fait qu’accentuer ses problèmes. Après son déclenchement en février 2022 par Vladimir Poutine, l’Agence spatiale européenne (ESA) avait ainsi dit renoncer à travailler avec Moscou sur le lancement de Luna-25 et sur les futures missions 26 et 27. Le président russe avait, lui, toutefois jurer que Moscou ferait tout pour garder sa place dans l’espace - où la concurrence grandit -, prenant pour exemple l'envoi par l'URSS du premier homme dans l’espace en 1961, en pleine escalade des tensions Est-Ouest. Ces dernières années, une nouvelle course vers la Lune s’est engagée, outre les Etats-Unis, la Chine, l’Inde et la Corée du Sud affichent de grandes ambitions, tout comme plusieurs sociétés privées.