Marasme du bio : les producteurs dans l'attente d'un plan de soutien
Publié le - par Le blob.fr, avec l'AFP
Une consommation en déclin, des producteurs qui arrêtent, d'autres découragés de se lancer : le ministre de l'Agriculture doit annoncer mercredi un plan de soutien à la production biologique, confrontée à une crise inédite. Marc Fesneau est attendu à la mi-journée dans une ferme de l'Oise pour « annoncer les principales orientations du plan de soutien à l'agriculture biologique », selon la note communiquée à la presse.
Le marché des produits biologiques a commencé à se retourner en 2021 après des années de croissance à deux chiffres, qui avait dopé les conversions vers cette agriculture sans pesticides ni engrais issus de la chimie de synthèse. Mais les consommateurs, essorés par l'inflation (+15% sur un an en avril pour l'alimentation), se détournent du bio au profit d'alternatives moins chères. L'an dernier, les ventes de produits bio ont reculé de plus de 7% dans les supermarchés, selon le panéliste NielsenIQ, et l'offre dépasse désormais la demande.
Selon une source au ministère de l'Agriculture, le plan devrait comporter des aides directes et actionner le « levier de la commande publique » afin de redresser la demande. Dans l'optique de fournir un débouché régulier à la production bio, la loi Alimentation (ou Egalim, 2018) avait fixé pour 2022 le principe d'un minimum de 20% de bio dans les menus de la restauration collective (cantines scolaires, hôpitaux). Mais « on n'a pas mis les moyens financiers pour le faire, a-t-on constaté de même source. La part du bio plafonne autour de 6% ». « On est encore loin des 20% mais certains exemples comme la ville de Bègles (70% de bio), 44.000 habitants, ou d'Epinal (68% de bio), 33.000 habitants, démontrent qu'il est possible d'atteindre l'objectif et de le dépasser très largement », a souligné Laure Verdeau, directrice de l'Agence bio, chargée de développer et promouvoir l'agriculture biologique française. « On attend aussi des annonces fortes sur l'information des citoyens parce que plus un citoyen en sait sur le bio plus il en mange », a ajouté Mme Verdeau.
« Coup de frein »
Une première « aide d'urgence » aux agriculteurs bio, de 10 millions d'euros, avait été actée au Salon de l'agriculture, fin février. La somme, présentée par la Première ministre Elisabeth Borne aux professionnels agricoles lors d'une session à huis clos, avait été jugée « anecdotique » voire « méprisante » par des organisations.
À peine élu président du syndicat agricole majoritaire FNSEA, Arnaud Rousseau a réclamé mi-avril un « plan massif », de « 50 à 100 millions d'euros », pour les producteurs bio qui « traversent une crise sans précédent ». « Les besoins sont évalués à 151 millions d'euros pour 2022, avec un risque d'aggravation en 2023 », indiquait lundi dans un communiqué la Fédération nationale d'agriculture biologique (Fnab). L'organisation plaide aussi pour un soutien pérenne et demande de rehausser les aides attribuées aux producteurs bio via la politique agricole commune (PAC).
La Cour des comptes avait estimé en juin 2022 que « la politique de soutien à l'agriculture biologique menée par le ministère de l'Agriculture port(ait) des objectifs ambitieux, sans allocation de moyens suffisants ». Outre les 20% de bio dans les cantines, la France n'a pas non plus atteint son objectif de 15% de surfaces agricoles utiles (SAU) en bio en 2022 (10% actuellement). Le nouvel objectif officiel (18% des surfaces en bio en 2027), semble déjà compromis : la croissance du nombre de nouveaux producteurs bio a ralenti. En 2022, 5.245 nouveaux producteurs bio ont été recensés, contre 7.706 en 2021, selon l'Agence bio. En parallèle, 3.380 sorties du bio ont été dénombrées, contre 2.510 en 2021. Le solde entre les entrants et les sortants « reste encore positif mais traduit un réel coup de frein dans la dynamique des conversions », relevait l'agence en avril. Elle regrettait que « bien trop souvent les producteurs voulant passer à l'agriculture biologique en 2022 se sont retrouvés freinés par les acteurs du marché arguant que le marché n'était plus là pour les accueillir, faute de demande des consommateurs ».