Catherine Belzung Biologiste Inserm
-Je suis C. Belzung, professeur de neurosciences.
J'anime une équipe de recherches qui se focalise sur la dépression, les mécanismes neurobiologiques de la dépression et de la résistance aux antidépresseurs.
Dans notre laboratoire, nous avons des chercheurs, des psychologues, des biologistes, des psychiatres, des philosophes, des économistes, des mathématiciens parce que nous sommes convaincus que pour progresser sur une thématique comme celle de la dépression, la seule solution est une approche pluridisciplinaire et intégrée.
Les 2/3 des patients sont insensibles aux antidépresseurs, donc il faut améliorer la réponse aux antidépresseurs et donc comprendre comment ils marchent.
Nous nous intéressons à la contribution de nouveaux neurones dans le cerveau.
On pensait que l'adulte ne faisait que perdre des neurones mais c'est faux.
On sait, depuis l'été dernier, que tous les jours, un sujet adulte, y compris une personne âgée, fabrique 700 nouveaux neurones.
On essaie de comprendre de quelle manière ces nouveaux neurones du cerveau contribuent aux états dépressifs et aux effets des antidépresseurs.
On étudie ça chez l'homme, chez des sujets déprimés, mais on l'étudie aussi dans des modèles animaux.
On essaie de prendre des souris qui soient un peu sensibles au stress et on leur produit des tracas quotidiens.
Par exemple, on penche leur cage pendant une heure, on met un peu d'eau sur le sol, on projette un cri de prédateur.
Petit à petit, les souris vont développer un état dépressif.
Après on va regarder si on a modifié les nouveaux neurones, leur densité, leur vitesse de maturation.
On peut regarder beaucoup de choses dans ces régions du cerveau.
On peut aussi voir à quoi servent ces neurones.
On a découvert que ces neurones permettent de lutter contre le stress.
Donc dans la dépression, il y a un cercle vicieux.
Le stress détruit les nouveaux neurones, or ces neurones sont justement importants pour lutter contre le stress.
On a montré que chez les sujets chez qui les antidépresseurs ne marchent pas, les antidépresseurs n'augmentent plus le nombre de nouveaux neurones.
On a aussi montré qu'augmenter le nombre de neurones est suffisant pour induire un effet antidépresseur.
On n'a pas besoin d'en prescrire.
On pourra imaginer des thérapies du futur où on augmente simplement le nombre de neurones.
Des choses plus futuristes, c'est d'utiliser des stimulations électriques, par exemple, directement, et de ne plus utiliser de pharmacothérapie, ce qui permettrait d'agir uniquement sur l'élément clé, crucial, dans la dépression.