MAI 68, la science s’affiche
Épisodes Scriptés
Épisode 7
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SCHUCH PRODUCTIONS PRÉSENTE
AVEC LE SOUTIENT DE L’INSERM
EN COPRODUCTION AVEC CNRS IMAGES
EN ASSOCIATION AVEC UNIVERSCIENCE
MAI 68 LA SCIENCE S’AFFICHE
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Ségolène Aymé
Jusque dans le début des années 70, l'avortement était illégal. La pratique sur soi de l'avortement fallait vingt ans de prison. Qu'est-ce que faisaient les femmes ?elles essayaient de déclencher une fausse couche par des moyens artisanaux, et quand elles commençaient à saigner elles allaient à l'hôpital pour un curetage. Voilà… Et il y avait des centaines de femmes chaque année qui mourraient à cause de ces pratiques.
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Pierre Jouannet
Pour moi, ça a commencé par la première permanence de planning familiale en milieu étudiant. Parmi les jeunes femmes qui venaient nous consulter il y en avait qui étaient enceinte et qui sollicitaient une aide pour pouvoir avorter. Et puis après 68, un jour, pin m'a proposé de rencontrer un psychologue californien qui s'appelait Harvey Karman pour montrer la méthode d'avortement qu'il avait développée. Et donc je suis allé un dimanche matin chez Delphine Serrigue. Et dans son salon il y avait Karman, et il y avait un certain nombre de femmes militantes du MLF ou autre, et puis une jeune fille enceinte, et pour moi ça a été fascinant cet avortement, parce que ça s'est passé de manière très simple, sans vraiment de douleur pour la jeune fille.
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Ségolène Aymé
Je n'ai pas compris que les médecins n'aient pas envie de s'emparer de cette méthode et de la généraliser parce que ça changeait absolument tout. Ça m'a profondément touchée en tant que femme mais aussi en tant que médecin. J'avais les deux. J'avais la honte pour mes collègues de ne pas le faire, et j'avais le sentiment que pour les femmes, c'était révoltant que, alors que c'était possible, on n'en bénéficie pas. Et donc il y avait un choix sociétale qui était fait.
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Archives : émission de TV
"Avortement libre : pour ou contre ? Des médecins parlent !"
"Il ne faut pas s'y tromper : le sang des foetus est rouge ! Comme celui de sa mère, et de tous les hommes !"
02:24
Pierre Jouannet
Il y avait à l'époque le manifeste des 343 femmes, qui avaient fait des avortements. Et s'est dit : peut-être qu'on peut apporter un complément à ce manifeste, en disant que nous on va faire le manifeste des médecins qui avaient fait des avortements.
02:38
Archives : voix off reportage TV
"Ce que veulent les 330 signataires, il l'ont dit : une modification de la loi de 1920. Que l'avortement aujourd'hui clandestin devienne un acte médical normal, remboursé par la sécurité sociale.
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Pierre Jouannet
Et ce qu'on a proposé c'est qu'il y ait la création d'un mouvement, d'une organisation, et ça a été la création du MLAC.
02:59
Archives : captation d'une manifestation
"Avortement, contraception, vivez la vie ! Avortement, contraception, vivez la vie ! Avortement, contraception, vivez la vie !"
03:11
Ségolène Aymé
C'est comme ça que je me suis engagée, et que j'ai fait pendant plusieurs années des centaines avortements… Voilà.
03:18
Archives : captation d'un avortement à l'époque
"-Alors là, vu que ton orifice était bien ouvert, que tu es à un peu plus de 8 semaines, je vais essayer de passer à un tout petit peu plus gros. Tu vois, ça c'est un diamètre qu'on appelle 6, l'autre sera 8, tu vois il n'y a pas une grosse différence.
-Oui ? d'accord. Oui là je sens que ça tire…
-Tu le sens ? Ça fout le camp ? Oui, j'ai déjà beaucoup de choses dans ma seringue."
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Ségolène Aymé
C'était, pour moi, une période très initiatique dans le sens où à un moment donné évidemment on se pose des questions sur son engagement au regard du risque. On était pas à l'abri d'avoir une complication, peut-être même mortelle, au cours d'un avortement. C'est des questions qu'on se pose et moi j'ai eu quelques sueurs froides quand même à certains moments, qui m'ont énormément ébranlée mais je trouvais que ce combat était capital.
04:02
Pierre Jouannet
Et tout ça a mis le gouvernement de l'époque dans une situation délicate, jusqu'au moment où ils ont compris que c'était pas possible de continuer comme ça, et que donc il fallait changer cette loi.
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Archives :
-extrait d'un discours de Simone Veil
"Je voudrais tout d'abord vous faire partager une conviction de femme : aucune femme ne recours de gaîté de coeur à l'avortement."
-commentaire TV
"Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs, bonjour. C'est à 3h40 ce matin que l'Assemblée Nationale a finalement adopté en première lecture le projet de loi relatif à l'interruption de la grossesse.
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Pierre Jouannet
Et aujourd'hui je trouve qu'on est dans des situations très similaires à-propos de l'aide à la procréations femmes qui ne sont pas dans le schéma traditionnel de la famille, c'est-à-dire du couple hétérosexuel qui va procréer.
Si on accepte et que la société accepte que la femme soit libre de décider d'interrompre une grossesse quand elle a une grossesse qu'elle ne souhaite pas mener à terme, et ça c'est la loi de 1975 de Simone Veil, je vois pas pourquoi elle serait pas libre de pouvoir avoir un enfant, y compris si elle vit seule ou si elle fait partie d'un couple homosexuel entre deux femmes.
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