Est-ce une légende, une matière venue d’un autre monde, une révolution scientifique ? En septembre 2025, des chercheurs ont annoncé avoir créé un cristal spatio-temporel observable à l’œil nu. Même si ça sonne comme de la science-fiction, le cristal temporel existe bel et bien. De l’hypothèse d’un prix Nobel à des expériences concrètes en laboratoire, où en sommes-nous sur cette nouvelle façon de penser la matière ? Pour comprendre le cristal temporel, il faut d’abord comprendre ce qu’est un cristal… tout court. Si l’on observe un cristal de très, très près, à l’échelle des atomes, on découvre une organisation fascinante : les atomes y sont rangés selon un motif qui se répète, encore et encore, un peu comme les carreaux d’un carrelage. Cette répétition dans l’espace, c’est ce qui définit un cristal classique, comme le sel ou le diamant. Et si ce motif pouvait aussi se répéter dans le temps ? Imaginez un mouvement collectif qui se répète indéfiniment, identique à lui-même : un peu comme un métronome, une balançoire ou une ola dans un stade. Et bien ça, c’est l’idée d’un cristal temporel, ou presque. Contrairement aux exemples précédents, le cristal temporel n’oscille pas à une fréquence imposée par l’énergie qu’on lui apporte, ni par son système. Autrement dit, la symétrie du temps est brisée : En gros on lui donne une musique pour le faire danser, mais il va danser sur un tempo complètement différent, et ce, peu importe la musique. Mais à quoi ça sert, concrètement ? Les cristaux temporels pourraient transformer plusieurs domaines de la science et de la technologie. À l’échelle quantique, ils pourraient stabiliser les qubits, ces unités d’information très fragiles des ordinateurs quantiques, en leur fournissant une oscillation régulière qui protège leur état et les rend plus fiables. En télécommunications, leur rythme ultra-précis pourrait servir à contrôler avec exactitude les signaux électromagnétiques, réduisant les interférences et améliorant la rapidité des communications. Le concept est plutôt récent. C’est Frank Wilczek, prix nobel de physique, qui propose cette théorie en 2012. Quelques années plus tard, des équipes aux États-Unis et en Allemagne réussissent à produire un cristal temporel en laboratoire. D’abord limité à quelques millisecondes en 2017, il a ensuite été stabilisé quelques secondes grâce à un ordinateur quantique à Stanford en 2021, puis plusieurs dizaines de minutes à Dortmund en 2024, grâce à différentes techniques expérimentales. Mais en septembre 2025, des chercheurs du Colorado ont mis en évidence ce phénomène en utilisant des cristaux liquides, éclairés à la lumière naturelle. Les cristaux liquides sont un matériau entre l’état solide et liquide. Les molécules sont libres de se déplacer comme dans un liquide, mais orientées et ordonnées comme dans un cristal. On en trouve dans la plupart des écrans. C’est d’ailleurs en s’inspirant d’un écran LCD que les scientifiques ont mis au point un cristal temporel visible à l'œil nu.
The experimental sample is in many ways similar to what we have in this place that everybody is familiar with. In the liquid crystal display you have, you know, two pieces of glass in between you sandwich a liquid crystal, and, and there would be some alignment control in orientation of these liquid crystal molecules.
[...] But then what we do differently is that we coat the surfaces of these glass plates with, very special azobenzene dye that responds to light. And then we do not need to apply electric field in this case, as we shine light and this material light passes through the liquid crystal, the dye responds to polarization of light, and then, liquid crystal responds by adopting certain orientations.
En clair, ce qu’ils ont fait, c’est utiliser la lumière pour exciter les molécules d’un cristal liquide. Cette lumière déclenche la formation de petites structures appelées solitons. Ils se comportent un peu comme les atomes d’un cristal classique, organisés dans l’espace, mais surtout, décrivent un motif qui évolue temporellement de façon périodique. Et en plus, ces solitons sont beaucoup plus gros que des atomes, donc observables avec un simple microscope. Et avec des cristaux liquides, Les chercheurs du Colorado proposent comme application un filigrane temporel :
In our papers we propose some ideas like can be anti-counterfeiting because we can make some time watermark [...]. When we shining a light, for a traditional watermark there is a pattern [...], this pattern is very hard to counterfeit [...]. For our case, also we are shining a light, but here the pattern is not a static pattern, here it is a dynamic pattern, which has a temporal periodicity. So this is even harder to make such these things. So that’s why we think it can be useful for anti-counterfeiting techniques.
Donc offrir la possibilité d’un motif qui change au cours du temps. Par exemple, si le filigrane de ton billet de banque est bleu, et que le mois prochain, tous les billets passent au vert, sauf le tien, c’est effectivement cramé qu’il est fake. Finalement, ce que l’on voit avec ces nouvelles expérimentations, c’est l’émergence d’un nouveau domaine de recherche. En une dizaine d’années, nous sommes passés d’un concept théorique à un phénomène observable à l'œil nu. Même si ces expérimentations sont pour l’instant très loin d’applications concrètes, les prochaines décennies s’annoncent prometteuses.