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L'hôpital Sébastopol où est maintenu en vie Vincent Lambert, le 20 mai 2019 à Reims © AFP/Archives FRANCOIS NASCIMBENI

Vers un épilogue dans l’affaire Vincent Lambert ? Le médecin de ce patient tétraplégique en état végétatif depuis plus de 10 ans, devenu le symbole du débat sur la fin de vie en France, a lancé mardi un nouvel arrêt des traitements, rendu possible vendredi par la Cour de cassation.

« Le cours de la procédure d’arrêt des traitements », enclenché le 20 mai, mais arrêté dès le lendemain sur demande de la Cour d’appel de Paris, « sera poursuivi à partir de ce jour », a déclaré par courriel le docteur Vincent Sanchez, chef de service de soins palliatifs du CHU de Reims, à chacun des membres de la famille de M. Lambert. Dans ce message envoyé à la mi-journée et dont l’AFP a eu connaissance, le médecin en appelle « à la responsabilité de chacun » afin que « l’accompagnement de M. Vincent Lambert soit le plus paisible, intime et personnel possible ». Le protocole médical prévoit notamment « un arrêt des traitements » ainsi qu’une « sédation profonde et continue ».

Vendredi, la Cour de cassation avait ouvert la voie à un nouvel arrêt de l’alimentation et de l’hydratation maintenant en vie Vincent Lambert, « point final » de cette affaire, car « il n’y a plus de voies de recours possibles », selon l’avocat de son épouse Rachel, qui se bat pour qu’il puisse mourir. La haute juridiction a cassé la décision de la cour d’appel de Paris qui, le 20 mai, lors d’un énième coup de théâtre dans cette affaire, avait ordonné la reprise des traitements, interrompus le matin même, de cet ancien infirmier de 42 ans, victime d’un accident de la route en 2008. La Cour de cassation a jugé que le juge judiciaire n’était pas compétent et prononcé cette cassation « sans renvoi » devant une autre juridiction.

« Meurtre avec préméditation »

La mère de Vincent Lambert, Viviane, totalement opposée pour sa part à l’arrêt des traitements, a pris la parole lundi à l’ONU à Genève pour lancer « un appel au secours ». « Sans votre intervention, mon fils Vincent Lambert sera euthanasié par un médecin en raison de son handicap cérébral (…) On veut l’assassiner ! », avait-elle affirmé. Ses avocats ont annoncé dès vendredi qu’ils porteraient plainte pour « meurtre avec préméditation » contre le médecin qui ordonnerait un arrêt des traitements.

Cette affaire est aussi l’histoire d’une famille déchirée par des années d’une tragique bataille judiciaire. Rachel Lambert est soutenue par six frères et sœurs et un neveu de Vincent, François Lambert, qui entendent mettre fin à cet « acharnement thérapeutique » et affirment que l’ancien infirmier avait pris position en ce sens. Vincent Lambert n’a toutefois pas laissé de directive anticipée.

Les parents, Viviane et Pierre Lambert, fervents catholiques et considérés proches des milieux intégristes, estiment eux que leur fils est handicapé et non « pas en fin de vie, ni un légume » et demandent qu’il soit transféré dans un établissement spécialisé.

« J’espère que ce sera l’épilogue », a déclaré à l’AFP Marie-Geneviève Lambert, sœur de Vincent et favorable à l’arrêt des traitements. « Je suis rassurée que le médecin n’ait pas craqué et ne se soit pas senti menacé par les promesses de procès », a-t-elle déclaré en redoutant toutefois que le processus ne se fasse « pas dans la plus grande sérénité ».

Avant celle de mai, le CHU de Reims avait déjà lancé puis stoppé deux procédures d’arrêt des traitements, l’une portée par le docteur Éric Kariger en 2013, l’autre par son successeur, le docteur Daniéla Simon en 2015. 

L’interruption actuelle des traitements, conformément à une décision médicale signée par le Dr Sanchez en avril 2018, a été validée par le Conseil d’État fin avril et le recours des parents devant la Cour européenne des droits de l’Homme a échoué. Père de la loi de 2016 régissant la fin de vie, l’ancien député LR Jean Leonetti juge que l’arrêt des traitements de Vincent Lambert s’inscrit bien « dans le cadre de la loi ».