On a parfois du mal à juger de l’impact d’un vaccin. Allons voir les données. On croit souvent que c’est Louis Pasteur qui en 1885, a inventé le vaccin, à la suite de ses travaux sur le virus de la rage. Il n’en est rien. Si ses recherches en microbiologie ont été fondamentales, il faut remonter au moins à l’année 1796. L’anglais Edward Jenner parvient à immuniser un enfant contre la terrible variole en lui injectant du pus provenant d’une vache atteinte d’une forme voisine de la maladie, bénigne pour l’homme, la « vaccine ». Le principe du vaccin était là, son nom anglais également. et vaccine devient en français « vaccin ». Pour beaucoup de maladies dangereuses, la découverte d’un vaccin et la mise en place de campagnes de vaccination ont radicalement changé la donne. La variole, justement, était une maladie infectieuse virale au taux de mortalité 10 fois plus élevé que le choléra. Dans les années 50, elle touchait près de 50 millions de personnes par an. En 1957, l’Organisation Mondiale de la Santé lance une campagne de vaccination massive. La maladie est complètement éradiquée en 1980. En 1952 est découvert le vaccin contre la poliomyélite, maladie paralytique extrêmement dangereuse. Une campagne de vaccination massive est lancée en 1988. La maladie est éradiquée en Europe en 2002. En 2015, avec 85% de la population mondiale vaccinée, le nombre de cas a chuté de près de 99% à l’échelle de la planète. Mais que signifient vraiment ces chiffres ? A l’échelle de l’individu l’efficacité d’un vaccin peut se mesurer selon le risque d’attraper la maladie malgré sa vaccination. Par exemple, pour la polio, on estime l’efficacité du vaccin à 100% après trois injections, mais seulement à 78% pour l’un des principaux vaccins contre la coqueluche. Depuis la mise au point du vaccin contre la fièvre jaune en 1938, on n’a comptabilisé que 12 personnes qui auraient contracté la maladie après avoir été vaccinées. Il faut bien sûr prendre aussi en compte les effets secondaires d’un vaccin. Pour la majorité d’entre eux, ils sont bénins douleurs au point d’injection, maux de tête ou faible fièvre. Dans le cas de la grippe saisonnière par exemple, qui demande une adaptation annuelle du vaccin, une étude américaine suivant 750 millions de vaccinations sur 15 ans ne notait aucune réaction nécessitant le recours à un médecin. En 2015, un vaccin est mis au point pour protéger des complications de la dengue, transmise par les moustiques. C’est un virus qui peut infecter plusieurs fois le même individu, et qui touche environ 390 millions de personnes par an. Les premières vaccinations sont lancées la même année. Mais deux ans plus tard, en 2017, une étude complémentaire révèle un problème. chez des patients n’ayant jamais rencontré le virus, la vaccination multiplie par 2,3 le risque de complications dans le cas d’une infection post vaccinale. Le vaccin ne doit donc être prescrit qu’aux patients ayant déjà rencontré la dengue. le risque de complications est alors divisé par 4 ou 5. Le cas de la dengue le montre, les modalités de la protection varient d’une maladie à l’autre. C’est notamment le cas pour la durée de l’efficacité. Celle du vaccin contre la polio dure toute la vie alors que celle du vaccin contre la coqueluche ne dure que 5 ans et doit donc faire l’objet de rappels. Mais l’impact d’un vaccin se mesure également à l’échelle de la société, surtout dans le cas des maladies hautement contagieuses. Une personne atteinte de la rougeole, par exemple, peut contaminer entre 12 et 18 personnes. Ce chiffre est ce que l’on appelle le nombre de reproduction de base, baptisé aussi R0. Pour que l’épidémie soit stoppée, plus de 90% de la population doit être vaccinée. En revanche, le R0 n’est pas pertinent pour une maladie non contagieuse, comme le tétanos. Mais dans tous les cas de figure, la couverture vaccinale de la population joue un grand rôle pour contrer une maladie. Ainsi en 2011, on atteignait un seuil de 85% de la population mondiale vaccinée contre la coqueluche, le tétanos et la diphtérie. L’apparition du COVID-19, en novembre 2019, a montré une chose importante. Lorsqu'apparaît un nouveau virus ou qu’une maladie se développe dangereusement, on fonde de grands espoirs sur la mise au point d’un vaccin et le lancement de vaccinations massives devient une priorité sanitaire. Alors prenons un peu de recul. Depuis la découverte d’une souche virale ou bactérienne jusqu’à l’éradication d’une maladie, en passant par les campagnes de vaccination, le développement d’un vaccin s’effectue à des rythmes différents, souvent en plusieurs étapes. Mais on le voit très clairement en comparant les temporalités de différentes maladies à partir de la mise au point du vaccin, même si les durées ont plutôt tendance à se réduire avec les progrès de la recherche, chaque situation est différente, et ce qui change avec l’arrivée d’un vaccin se juge en réalité au cas par cas.
Réalisation :
Pascal Goblot
Production :
Universcience, Escalenta, Arte G.E.I.E, CCSTI La Turbine Sciences, ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche.
Année de production :
2021
Durée :
5min36